A l’heure du complotisme galopant, roulez A Contresens

La propagande a de tout temps été le moyen de manipuler les masses en instillant fausses informations et doutes. Dans le film reportage réalisé par Jérôme Piguet sur les contre-vérités qui accablent le véhicule électrique, complaisamment diffusées par une presse paresseuse ou sans moyens d’enquêter, ce documentaire porte bien son titre : ” A Contresens “.

A contresens : c’est dans cette direction que Jonas Schneiter et Marc Muller nous invitent à les suivre pour découvrir, à la source, les dessous de la formidable intox dont est victime la voiture électrique (VE). A l’issue d’une enquête fouillée, nous emmenant du Congo au Chili et de la Suisse à la Flandre, on finit par comprendre les raisons de tant de désinformation. Car la voiture électrique vise à détrôner la voiture à pétrole, technologie née à la fin du 19ème, puis promue et massifiée durant le 20ème siècle.

Le récit du documentaire est construit en partant d’interrogations nées d’informations données par la presse, de déclarations assénées par les acteurs des filières concernées ou d’enquêtes promues par les médias comme étant l’œuvre de lanceurs d’alerte voulant dessiller l’opinion publique.

A partir de ces interrogations, l’ingénieur suisse Marc Muller se lance dans une investigation approfondie sur chacun des points qui font débat, ne lésinant pas sur les moyens et consacrant deux ans à départager le vrai du faux. C’est un travail de fond, mains dans le cambouis (au propre comme au figuré), pour mener des entretiens ciblés avec experts et opérationnels, ou en désossant deux bagnoles neuves, achetées pour l’occasion.

Jouant les naïfs lorsqu’il pose ses questions aux acteurs de terrain, Muller découvre pour nous ce qui se cache derrière le rideau d’accusations à l’emporte-pièce et les mises à l’index hâtives, proférées par les procureurs auto proclamés se prétendant gardiens de l’environnement ou de l’éthique.

La bouffonnerie ainsi démasquée serait risible si elle ne portait aussi gravement atteinte à la volonté, si imparfaite soit-elle, de sortir d’un modèle mortifère nous conduisant irrémédiablement contre le mur.

Le film A Contresens nous donne également les clés de décryptage de cette formidable machination, nous invitant à nous insurger, contre arguments à l’appui, contre la manipulation.

Si Tavarès le dit…

Carlos Tavarés nous prédit un scandale majeur (genre dieselgate, qu’il n’a sûrement pas encore digéré) dans un avenir proche si les politiques publiques s’obstinent à promouvoir la VE. Mais ce qu’il faut comprendre des propos du patron de PSA, déguisé en lanceur d’alerte pour la circonstance, c’est un cri de désespoir. Les enjeux économiques et sociaux des transformations à venir de l’outil de production sont de très grande ampleur, puisque chiffrés à 14 milliards d’Euros pour l’ensemble de l’industrie automobile rien que pour 2021.

Dans un tel contexte, notre lanceur d’alerte écolo, appuyé dans son combat par d’autres majors vivant de l’industrie automobile, fait tout son possible pour ralentir une transformation qu’il sait pourtant inéluctable. (Article sur le sujet)

Quels impacts sur l’industrie automobile ?

La voiture électrique rebat les cartes sur plusieurs aspects de l’appareil de production actuel. Elle nécessiterait moins de main d’œuvre puisque le véhicule est plus facile à fabriquer (moins de composants) : la presse française avance le chiffre de quinze-mille emplois en jeu.

Mais ce sont surtout les volets financiers qui inquiètent notre Julien Assange de Sochaux puisque rien que pour le groupe qu’il dirige la perte de CA serait de l’ordre de 20 %, sans parler des amendes encourues, si les émissions de CO2 ne baissent pas comme prévu par la loi, dont le montant pourrait représenter jusque 20 % des bénéfices. Tout ça pourrait atteindre pour PSA environ 1 milliard d’Euros (ou 4 Mds€ pour Volkswagen).

Pour ces deux constructeurs, lesquels on fait leur beurre depuis des lustres sur la motorisation diesel, la pilule est dure à avaler. Il faut savoir que, contrairement à ce qui est dit dans le film, ce n’est pas vraiment l’Etat français qui a obligé PSA à persévérer sur le gasoil, mais bien l’ancien patron de PSA, Jacques Calvet, qui, au début des années 80, aurait fait du chantage à l’emploi afin de préserver sa technologie préférée sur laquelle son groupe avait fait sa spécialité.

L’essor du parc automobile diesel a été dès lors fulgurant, faisant passer la part de cette motorisation en France à plus de 70 % en moins de 20 ans.

Que n’a-t-on entendu, sur tous les tons et pendant des années, nous vanter les vertus écologiques du diesel, moins émetteur que les versions essence !

A l’instar de l’industrie nucléaire, ayant vu dans l’argument CO2 la planche de salut commercial, le diesel, estampillé écolo, a été fourgué aux Français à haute dose.

Propagande

La propagande sur les réseaux sociaux, sans laquelle le Brexit ne l’aurait pas emporté au RU, ni le président sortant des EU n’aurait recueilli 72 millions de voix, a été et reste encore prédominante aussi dans le dénigrement de la VE.

La task force mise en place avec des moyens illimités pour résister à la reconnaissance des dangers du tabac, menant à son l’interdiction dans les lieux publics, est une preuve évidente de ce que peuvent faire certains industriels dont le seul souci est de préserver leur modèle économique (on pense aux frères Koch, dont Tavarés n’est qu’une pâle copie).

La VE se trouve en 2020 dans la situation des politiques anti-tabac en 1990 : victime de propagandes de dénigrement et de dénis colportés par des relais d’opinion sans scrupules ou par des médias ayant oublié toute déontologie.

On ne s’explique pas autrement comment, durant plusieurs décennies, la promotion et la vente libre d’un poison avéré a pu continuer sans entraves, ou la réalité du bouleversement climatique a pu tout autant être niée ou minimisée publiquement.

Espérons que la mutation de la motorisation au pétrole vers l’électrique ne soit pas aussi longue et ne provoque autant de morts et de malheurs que n’ont provoqué les cigarettes.

Les lanceurs de fake-news s’acharnent sur tous les vecteurs de transformation, qu’elles soient sociétales ou de nos consommations. La voiture électrique n’y échappe pas ; tout comme son corollaire, les sources de production d’électricité renouvelable qui peuvent les alimenter.

Aussi éolien et photovoltaïque sont-ils la cible des mêmes acharnements de la part des producteurs d’électricité traditionnels, de plus en plus désespérés face au rouleau compresseur de ces sources renouvelables, désormais compétitives quelle que soit la comparaison.

Un reportage diffusé par la chaîne Arte le 24 novembre (chaîne qu’on a connu mieux inspirée) foisonne d’analyses biaisées et partisanes dont l’objectif premier est de décrier les mutations technologiques en cours en prétendant éclairer leur “face cachée”.

Le but de ces dénonciations semble clair : culpabiliser le consommateur et, par voie de conséquence, l’inciter à ne surtout pas changer ses choix, en lui donnant des arguments pour crier avec les loups.

Le documentaire ” A Contresens ” nous éclaire en revanche sur la réalité de prétendus scandales qui se cacheraient derrière la fabrication des batteries ou des véhicules eux-mêmes.

Dès le début du film (juste après une voix américaine de JT assénant la première éructation), on aperçoit un vieux militant antinucléaire français, connu pour sa radicalité, nous expliquer que la VE émet des GES dès sa fabrication, avant même d’avoir roulé.

Quelle finesse d’analyse ! Personne n’y avait pensé. Enoncé comme un scandale, n’a-t-il pas songé que cela est vrai de n’importe quel véhicule ? Comme de toute construction ou fabrication neuve destiné, à l’usage, à produire (éoliennes) ou à consommer plus propre (la VE).

A son propos, il est pour le moins contradictoire de constater que ce même militant, autrefois connu pour sa lutte acharnée contre l’atome[2], soit devenu un militant tout aussi radical contre la VE, du fait, selon lui, qu’elle ne règle pas les problèmes climatiques posés par ses émissions de GES.

Emouvante métamorphose

Entendons-nous bien. Il ne s’agit pas dans cette chronique de passer sous silence l’un des messages majeurs que la transition énergétique se doit de véhiculer, à savoir, la sobriété dans nos consommations d’énergie et de ressources. Cette sobriété doit se faire à marche forcée, s’il le faut; nous sommes les premiers à le clamer.

Il ne s’agit pas non plus, par voie de conséquence, d’approuver tout ce que peuvent raconter certains constructeurs automobiles lorsqu’ils déclarent, la main sur le cœur, leur amour pour l’électrique ; car nous savons très bien que les acteurs de ce secteur sont, depuis toujours, des maîtres du greenwashing.

Nous considérons qu’il est aberrant de voir des constructeurs qui proposent des véritables tanks déplaçant plusieurs tonnes inutiles, prétendant faire de l’écologie sous prétexte que le véhicule est électrique : les Hummer à 1 000 CV et à $ 112 000 en sont la parfaite caricature

Mais les Tesla bourrées d’électronique et dont le poids avoisine les 2,5 tonnes en sont également un bel exemple de ce qu’il ne faut pas promouvoir. Car ce genre de bagnoles sont l’antithèse de la transition écologique. Fussent-elles défendues par leurs fabricants avec trémolos verts dans la voix.

Faut-il pour autant condamner toute technologie visant à nous sortir du pétrole – car c’est bien de cela qu’il s’agit et, tout autant, de réduire nos émissions de GES ne serait-ce qu’à l’usage – prétextant que ces technologies ont un fort impact carbone pour leur fabrication ?

Une telle posture revient à militer pour que rien ne change et pour que nous gardions les impacts et à la fabrication, et à l’usage.

Griefs infondés

Passons en revue les principaux griefs faits aux VE (ils se recoupent largement avec ceux qui sont faits aux éoliennes ou aux panneaux solaires). Le récit du film est construit, comme indiqué plus haut, en partant des arguments à charge, largement diffusés, pour ensuite les démonter un par un.

L’ingénieur Marc Muller part, armé de tous ces arguments, à la rencontre de ceux qui produisent ces matières premières à l’autre bout du monde.

Installé dans son garage genevois, son co-équipier Jonas Schneiter le suit pas à pas pour lui fournir de quoi challenger ses interlocuteurs et recueillir les résultats de ses enquêtes.

On parle d’abord du besoin de cobalt et de lithium, deux matériaux utilisés dans la fabrication des batteries, en plus de l’aluminium, le nickel et le manganèse. Outre le fait que le discours ambiant veut nous donner l’impression que cet usage est nouveau, que seuls les VE et les éoliennes en auraient besoin et que c’est à cause de ces usages (comme si les smartphones, qui en sont grandement utilisateurs, étaient des objets rares réservés à une élite) que leur extraction explose au Congo. Curieusement, on entend rarement ces mêmes reproches faits aux téléphones.

C’est ainsi que, dès le début du film, Marc Muller part à Paris à la rencontre du très médiatique Guillaume Pitron, célébré pour son livre paru en 2018, intitulé ” La Guerre des métaux rares “.

Pitron soutient devant la caméra qu’il y a dans la VE, « comme dans pas mal d’éoliennes », de métaux rares ; « beaucoup plus que dans une voiture à essence » notamment pour la batterie « qui contient certaines terres rares, en plus du graphite, cobalt, lithium… ». Et de poursuivre en nous listant quelques-uns de ces métaux ;

« … vous en avez une trentaine : béryllium, vanadium, gallium, cobalt, tungstène… et puis une classe de métaux rares qu’on appelle ‘terres rares’, subdivisés en une 15aine de métaux, dont le néodyme dans les moteurs de la plupart des VE car c’est lui qui fait tourner le moteur ».

Arrêtons-nous un instant sur ces appellations. « Métaux rares » n’est pas une appellation scientifique. Contrairement à la série de 17 éléments du tableau périodique de Mendeleïev, les lanthanides, dites également « terres rares »

Le lithium ou le cobalt ne sont pas des terres rares.  Tout au plus devrait-on parler de métaux critiques, par leur rareté géologique ou par l’intensité de la demande. Mettre dans le même sac les métaux critiques et les terres rares sous l’appellation « métaux rares » revient à mélanger les problèmes ou, ce qui est bien pire, vouloir créer sciemment la confusion.

On penche pour cette dernière option si l’on juge, par exemple, sur le fait que l’auteur du bouquin enchaîne aussi tôt dans l’entretien (pour appuyer son propos sur la saleté d’une exploitation minière) sur l’exemple du lutécium, lequel lui permet de nous dire que pour en « obtenir 1 kg de ce métal, il faut 1 250 t de roche »,

On se demande encore que vient faire ici le lutécium…

Et Pitron d’insister sur l’exploitation très sale de ces métaux ; pollution, nous dit-il, « déplacée dans des zones très reculées de la planète ». Et le voilà que dans son élan dénonciateur, il nous parle de fleuves pollués qui courent « sur des centaines de milliers de km ».

On aimerait bien savoir quels sont ces fleuves d’une telle longueur… On savait que les Français n’étaient pas très forts en géographie, Mais là…

Une chose est certaine, c’est que ces terres rares (je dis bien « terres ») sont relativement inconnues du grand public. D’abord parce que leur découverte ne date, pour les premières d’entre elles, que de la fin du 18ème siècle. Ensuite parce que leur utilisation s’est surtout développée à partir de la fin du 20ème siècle.

Ces terres rares font office d’épouvantail car, nous dit-on,

  • la Chine en a le monopole et cela lui permet de nous rendre dépendants.
  • Leur exploitation constitue une l’horreur humaine et un désastre écologique dont nous détournons le regard.

Partant de ces informations terrifiantes assénées par G. Pitron, Marc Muller décide d’aller voir sur place, en enquêtant au Congo – qui concentre 90 % de la production de cobalt mondial -, ou au Chili, d’où est extrait une bonne partie du lithium utilisé pour nos batteries.

Et ce que Muller a trouvé ne ressemble pas du tout à ce que racontent les contempteurs de la voiture électrique.

Mais avant de prendre l’avion, lui et son coéquipier enquêteur, Jonas Schneiter, décident de désosser jusqu’au dernier boulon les moteurs de deux véhicules, l’un électrique, l’autre à essence.

Alors, il y a quoi dans ces voitures ?

L’enjeu valant la chandelle, les enquêteurs décident d’acheter deux voitures neuves, l’une à essence (Fiat), l’autre électrique (Zoé). Et de démonter ces moteurs pièce par pièce pour en faire l’analyse des matériaux qui les composent.

Quelle ne fut pas leur surprise de voir que, contrairement aux ragots sur le terres rares (ou les métaux critiques), la Zoé n’en contenait aucune, ni dans son moteur, ni dans sa batterie. Alors que la voiture essence contient du cérium, une terre rare utilisée dans son pot catalytique.

Ce constat d’absence de terre rare dans la Zoé s’explique tout d’abord par le fait que son moteur est synchrone à rotor bobiné (et non asynchrone comme indiqué dans le film) ; elle n’a donc pas besoin d’aimants permanents pour induire le courant dans le rotor. Rappelons que la Zoé est la VE la plus vendue en Europe. Et en absence d’aimants permanents, pas besoin de néodyme, la terre rare dénoncée avec force par le chouchou des médias.

C’est également le cas des trois des sept VE les plus vendues, avec la Mercedes E300e et l’Audi e-Tron (dans celle-ci le moteur est bien asynchrone). Pour les autres, ces sont en général des voitures plus puissantes qui ont fait le choix de moteurs synchrones à aimants permanents à base de néodyme. On le voit bien, cela n’est pas en soi indispensable.

Cette donnée a dû échapper aux frères Koch, puissants lobbystes du pétrole bien connus, lesquels ont financé pour 10 M$ la réalisation d’un film dénonçant la VE ; film fournissant les arguments repris sans filtre par notre révélateur médiatique de faces cachées.

Par ailleurs, ce qui paraît le plus surprenant dans l’opération de nos fins limiers de chirurgie mécanique jumelée, c’est la découverte des composants du pot catalytique de la voiture à essence. En le démontant ils trouvent le nid d’abeille céramique et, sous les couches aluminium, silicium et magnésium, une couche pour la réaction catalytique faite de platine (métal critique s’il en est) et d’oxyde de cérium. Tiens ! une vraie terre rare…

Enfin ! Ces saloperies de batteries : si vous saviez ! Le cobalt… !

Pour répondre à ces questions taraudantes sur les batteries, Marc Muller va naviguer entre les mines de cobalt du Congo et une usine de recyclage à Anvers, en passant par la plus grande mine de lithium du Chili, un laboratoire fédéral d’analyse de matériaux en Suisse et une usine de fabrication de batteries lithium-ion à Willistät, en Allemagne.

Comme panel de connaisseurs pour se forger une idée objective du sujet, ce n’est déjà pas mal.  Mais il n’omet pas pour autant de s’entretenir avec les porteurs de paroles sceptiques ou dissidentes : syndicalistes, avocats, militants, représentants d’ONG et un guide touristique chilien très méfiant

Durant son périple, le reporter découvre que 90 % du cobalt mondial est produit en RDC. Il est à 80 % exploité par des industriels et 10 % par des mines artisanales légales, encadrées par une administration d’autant plus vigilante que le minerai constitue une importante source de devises pour le pays. Le reste du minerai étant extrait dans des mines familiales où il est possible de gagner facilement beaucoup d’argent, et dans lesquelles il est impossible de s’assurer que les conditions de travail soient irréprochables.

L’immense majorité des mines sont donc connues, publiques et répertoriées dans le cadastre minier, seule autorité délivrant des titres miniers. Même les mines artisanales autorisées sont cartographiées.

Mais voilà, une certaine presse a cru bon de dénoncer le scandale des conditions atroces d’exploitation des enfants dans les mines congolaises, images choc à l’appui. Bien qu’aucun journaliste ne soit allé voir par lui-même ces atrocités qu’il dénonce. Dommage, car il aurait découvert que les mines artisanales représentent 180 000 « creuseurs », dont le gouvernement a fait le choix de les encadrer, plutôt que de les empêcher de travailler. Par exemple, en supprimant les nombreux comptoirs d’achat en les remplaçant par un centre de négoce unique.

Désormais l’exploitation dite en « solo » est interdite et l’ONG « Pact-Congo » incite les creuseurs à s’affilier aux coopératives qui les encadrent et dont la création a été impulsée par l’Etat.

Au passage, lors de la visite qu’il n’a pas faite, le journaliste lambda scandalisé aurait peut-être appris que le salaire dans les mines industrielles se situe parmi les plus rémunérateurs du pays, à hauteur de $2 000 par mois – de quoi faire pâlir nos smicards ?

Et puis, il y a le lithium !

Evidemment, le lithium. Que ferait-on sans lui ? Et qui se soucie des flamands roses boliviens ? Y avez-vous pensé, inconscient détenteur d’une voiture électrique ? A cause de vos lubies soi-disant écolos, vous participez au bouleversement des écosystèmes et à la disparition de cette espèce emblématique des hauteurs andines.

Sans compter le pillage de la ressource hydrique mettant à mal les conditions de vie des populations locales.

Seulement voilà, la moitié de ce minerai consommé dans le monde ne vient pas d’Amérique latine, mais d’Australie, où son exploitation se fait à partir de roches et non de l’extraction de sa solution dans l’eau.

Quant à la moitié de l’autre moitié, elle provient du Chili. Le reste se répartit entre l’Argentine, la Chine, les Etats-Unis, le Zimbabwe et autres. La Bolivie, quant à elle, n’exploitait en 2018 que 300 t par an.

Enfin, les batteries – toutes les batteries, à commencer par celles des smartphones – consomment la moitié du lithium mondial. Vitrages, céramiques et autres productions industrielles en consomment le reste.

Très bien, me direz-vous, il y a pourtant bien une extraction au Chili, voisin de la Bolivie, dans des conditions écologiques contestables : qu’ils soient boliviens ou chiliens, les flamands roses ont le droit de vivre en paix. Tout comme les ours ou les loups chez nous, n’est-ce pas ?

Le fait est que, à ce jour, aucune étude ne prouve que la migration forcée de cette espèce d’oiseau soit due à une modification de leur environnement par l’extraction du lithium.

En fait, non seulement le lithium n’est pas extrait au Chili par excavation – mais par pompage en profondeur de la saumure qui le contient -, mais le tout premier objectif de ces pompages n’est pas de produire du lithium : c’est d’en extraire du potassium, dont l’agriculture intensive est très friande.

Le lithium n’est dans ce process qu’un produit résiduel, obtenu, comme le potassium, par évaporation au soleil de la saumure. Comme le font les saulniers à Guérande ou en Camargue de manière ancestrale. Aucune substance chimique n’est utilisée dans ce process.

Les minéraux ainsi obtenus sur 4 600 ha de bassins d’évaporation dégagent principalement du potassium ; et ce sont seulement 200 ha qui sont consacrés au lithium. Et ça en est encore trop par rapport aux besoins. A tel point qu’une bonne partie de ce minerai est réinjectée dans son puits d’origine. A elle seule la mine visitée représenterait 20% du lithium mondial.

Très bien. Mais que deviennent les mares d’eau cristalline dans lesquelles baignent les fines pattes des flamands ? Eh bien, personne n’y touche. Les couches concernées seraient géologiquement étanches. La saumure des profondeurs n’est pas en contact avec l’eau de surface.

Pour satisfaire aux besoins en eau de la mine, celle-ci est pompée dans la mer, à Antofagasta, puis transportée et traitée sur le site minier.

Pourtant, à San Pedro de Atacama, le guide touristique interrogé dit que la mine est responsable d’une surconsommation dommageable pour les habitants (voir plus haut). Dans son propos Il accuse, amer, le gouvernement du mal endémique de l’Amérique latine, la corruption, Et il désigne également le corrupteur, c’est-à-dire le “Nord”, prêt à payer pour occulter ses méfaits.

En tout cas, les exploitants s’acquittent de droits conséquents pour extraire ce lithium chilien, puisque 40 % du CA y est consacré. Bon, admettons que les ressources pour la fabrication ne soient pas un vrai problème. Mais après ?

Tout d’abord on apprend que les batteries se réparent : on peut changer les blocs qui la composent, comme l’affirme le mécano ayant démonté celle de la Zoé devant la caméra.

Pour ce qui est de la durée de vie, on parle de 1 000 cycles charge pleine, soit de quoi parcourir en moyenne 300 000 km : la voiture rendra l’âme avant sa batterie.

Quant aux tant décriées terres rares, nous voilà partis à leur recherche au cœur de la batterie. Guidés par un fabricant allemand dans son usine, on y découvre qu’elle contient des feuilles aluminium à peine plus épaisses que le papier de cuisine, sur lesquelles est déposée une couche de masse active faite de nickel, manganèse et cobalt. Ce dernier ne représente que 1 ou 2 % de la masse de la cellule – et il y en aura de moins en moins.

Et, oh surprise ! Aucune terre rare. En plus des métaux cités, il y a du cuivre et le fameux lithium, qui rappelons-le, ce n’est ni une terre rare, ni un métal critique. Ce lithium, qui n’est pas utilisé sous forme métallique, mais en ions, ne pèse que 4 % du poids total de la cellule.

Tous les métaux sont récupérés, sauf le lithium, qui ne l’est que moyennement pour des raisons de coût, en attendant – selon le directeur de la technologie industrielle consulté – les volumes critiques et l’amélioration des technologies de recyclage.

Après ces affirmations, que l’on pourrait tenir pour partisanes, nous voilà repartis en Suisse demander avis à l’un des chercheurs de l’EMPA, labo fédéral de recherche et essais sur les matériaux : une batterie lui a été envoyée pour démontage.

Avec son accent caractéristique, le chercheur suisse va expliquer comment il découpe une cellule, devant nous, au cutter ; et nous montrer ce qu’on trouve à l’intérieur : une enveloppe contenant une superposition de couches de feuilles de cuivre recouvertes de graphite,

Nous voilà repartis pour faire un intrépide essai de récupération des matériaux, armés d’une pince à épiler et d’un cendrier rempli d’eau. Après trempage, la couche active (anode) en graphite se dissocie en quelques secondes. L’on obtient ainsi le cuivre d’origine à l’état pur. Fastoche, non ?

Cela-dit, le process industriel de séparation des métaux se fait assez bien en les chauffant dans un four. Rien de particulièrement compliqué, aux dires de notre chercheur.

Or, malgré cette visite rassurante, Muller part à Anvers, interroger un cadre de l’usine Umicore pour voir si l’industrie le fait vraiment. Il y découvre que leur procédé de récupération, combinant pyrométallurgie et hydrométallurgie, permettrait de tout séparer dans une vieille batterie, y compris le lithium. Le taux de récupération des métaux annoncé est ici de 95 %, sans pertes de qualité.

Umicore dit pouvoir utiliser ces métaux à l’infini. Et ils le font : cuivre, nickel, manganèse redeviennent les cathodes des prochaines batteries.

Conscients que les ressources en cobalt représentent 20 à 30 ans de consommation, ils savent, tout comme les Chinois qui recyclent déjà le lithium, qu’il est indispensable de le recycler. On parle donc d’une banque de matériaux qui devra se mettre en place.

Ok. Admettons que le recyclage existe bel et bien et se fasse dans des conditions acceptables. Et alors ?

L’origine de l’électricité utilisée pour la recharge restera le point faible de la VE. Qu’on se le dise !

Pour répondre à cette accusation, il y a un point sur lequel il faut de suite lever l’ambiguïté : celui de l’augmentation des besoins électriques.

Il a été calculé en Suisse que si, demain, tout leur parc auto devenait électrique, la demande d’électricité n’augmenterait que de 10 %. Et même si cette demande devait, ailleurs, augmenter de 40 %, sachant que le remplacement du parc prendra entre 10 et 20 ans, cela veut dire que, tout au plus, l’augmentation de la demande annuelle ne serait que de 2 à 4 %. Soit un rythme déjà connu par le passé, n’ayant rien d’extraordinaire.

Pour comprendre ce résultat, il ne faut pas oublier, déjà à la base, l’énorme différence d’efficacité énergétique entre motorisations électrique et thermiques. Là où la première dépasse le 90 %, l’autre se traîne péniblement entre 30 et 36 %. Ce qui permet de dire que le véhicule à pétrole est avant tout une espèce d’appareil de chauffage roulant, dont les 2/3 de l’énergie qu’il consomme ne font que réchauffer l’atmosphère avec effet immédiat, via la chaleur dégagée par le radiateur et par l’échappement ; ce dernier y ajoutant, en différé, l’effet de serre provoqué par l’émission du carbone fossile due à la combustion

Quant aux émissions à la source de la production de cette électricité, pour ce qui est de la Suisse du moins, les études évoquées dans le film concluent à une division par deux comparées à celles d’une voiture à pétrole.

Mais même en considérant le mix de production électrique de tout autre pays européen, la VE est toujours plus sobre en émissions, y compris celui de l’Allemagne ou même de la Pologne, dont le mix est encore composé à 80 % de charbon. Il faut vraiment que toute l’électricité produite par le pays le soit au charbon – situation qui n’existe nulle part en Europe – pour que la VE atteigne les niveaux d’émission comparables à ceux de la voiture au pétrole.

Quid des études qui concluent le contraire, allant même jusqu’à « démontrer » qu’un Hummer (thermique) est plus vertueux qu’une Prius ?

Le problème c’est que ces « études » ne résistent pas à une analyse objective de leurs résultats, car ni la méthode, ni la source des données ne sont évoquées ou transparentes. Toutes ces études sont démontées par les universitaires qui les ont analysées. C’est ce qu’explique l’un des spécialistes des écobilans de l’université de Lucerne qui travaille pour l’institut indépendant Paul Scherrer, interrogé dans le film,

Il est à ce titre étonnant que ni des journaux tels Le Monde ou Mediapart (mais tous les titres européens ou presque s’y sont mis), n’aient pris la peine de creuser le sujet avant de prendre part à la curée pour dézinguer la VE.

On en arrive ainsi à faire croire que ceux qui dénoncent la VE sont “une masse” ; à l’opposé de ceux qui la soutiennent, qui ne représenteraient qu’une bande de bobos inconscients, plus quelques scientifiques déconnectés de la réalité, plus, bien sûr, les vendeurs de ces voitures.

Et pour conclure j’en reviens aux éoliennes. L’un des arguments majeurs invoqués par ses opposants, et qu’on entend à longueur de discours enflammés, est celui de la « défiguration des paysages ». Parole d’esthètes qui se veut incontestable.

Dans le débat sur la VE, on trouvera, sur la même veine esthétique, les amoureux des bruits produits par les moteurs thermiques, musique douce et irremplaçable qu’aucun moteur électrique ne pourra jamais nous procurer.

Voir plus loin.

Au point d’être rentré en violent conflit avec l’ONG qui l’employait et se faire virer pour s’être opposé à la publication par l’association Sortir du nucléaire d’un communiqué soutenant… la lutte contre le dérèglement climatique. https://www.autoplus.fr/actualite/gmc-hummer-ev-2021-la-demesure-electrique-238362

Rappel Wikipédia : Les lanthanides sont une famille de métaux du tableau périodique comprenant en réalité les seuls 15 éléments allant du lanthane (no 57) au lutécium (no 71). Avec le scandium et l’yttrium, ces éléments font partie des terres rares. Ils tirent leur nom du lanthane, premier de la famille, en raison de leurs propriétés chimiques très semblables à ce dernier. https://fr.wikipedia.org/wiki/Lanthanide

Ces métaux sont, contrairement à ce que suggère leur appellation, assez répandus dans la croûte terrestre, à l’égal de certains métaux usuels. Leurs propriétés électromagnétiques proviennent de leur configuration électronique

Pour en savoir plus sur cette problématique sur ce lien

Ainsi que toutes questions liées à l’énergie, consulter l’excellent site https://decrypterlenergie.org/

Ah, beh oui, bien sûr le lutécium ! : c’est l’une des terres rares la moins répandue sur la croute terrestre, à raison de 0.5 ppm. Ce chiffre veut dire que la quantité présente dans l’écorce terrestre est égale à la masse de celle-ci divisée par 2 millions. il est néanmoins bien plus courant que certains métaux comme l’argent, le mercure ou le bismuth

Ses applications sont limitées en raison de sa rareté et de son prix élevé. La production de cet élément demande en effet de le séparer des autres terres rares avec lesquelles il est toujours présent. (Source Wikipédia)

Bref, tout cela fait du Lutécium un épouvantail idéal pour venir en appui de ses thèses.

Sans compter que les aimants permanents ne sont pas forcément faits avec du néodyme. Le remplacement de ce dernier est l’un des axes de recherche actuels de l’industrie.

Charles Koch, le survivant de la fratrie, dont la famille a fait fortune depuis un siècle dans le pétrole, a fait de ce secteur d’activité, ainsi que du financement de la droite américaine, le combat de toute sa vie. A 85 ans, il semblerait qu’il commence à se poser des questions.

Ce même Pitron qui déclarait pourtant, dans un entretien accordé à Thinkerview au sujet de « L’enfumage de la transition énergétique » :

« Je suis trop content de me débarrasser du pétrole et du charbon, je ne veux plus en entendre parler. Et on est tous d’accord pour dire que si le nucléaire peut baisser dans les mix énergétiques, c’est bien. Je suis pour cette transition écologique. Je préfère davantage d’éoliennes, et moins de centrales à charbon. Je préfère davantage de panneaux solaires, et moins de centrales à pétrole. A choisir, je prends », affirme-t-il.

Evoquant « un moindre mal », il justifie : « Je prends pour au moins une raison, c’est que ça émet moins de gaz à effet de serre. […] Il y a des choses à faire pour limiter les effets pervers de cette transition, et peut-être qui si on les met strictement en œuvre, on va peut-être y arriver ».

https://youtu.be/2lHTHINmNVk?t=4324

à qui il arrive de ne pas pouvoir se doucher le matin, car la mine pomperait cent litres d’eau par seconde sur les 2 000 litres disponibles pour la population. Mais les responsables de la mine disent n’en utiliser que 15 litres/sec.

C’est une autre vertu de ce film, le fait de donner la parole à tous ; les opposants ont droit de s’exprimer ; ils sont interrogés et avancent leurs arguments. Chacun peut se faire son opinion en soupesant les avis contradictoires. Nous eussions aimé voir la même démarche dans le film de Pitron-Arte, dans lequel aucune parole contradictoire n’a eu droit de cité.

Les recettes fiscales représentent entre 35 et 50% du prix de vente, Le représentant des petites entreprises interrogé ne manque pas de dénoncer la corruption qu’une telle manne ne manque pas de  générer au profit des autorités de ce jeune Etat, indépendant depuis 60 ans seulement.

La plus grosse de ces mines industrielles produit à elle seule 60 % du cobalt congolais.

Entre 10 et 12 M$ par an, dont 3.5 % revient aux communautés locales.

Quant au lithium, il y en aurait pour 200 ans.

A l’image du fer, largement utilisé par l’humanité depuis la nuit des temps, à tel point qu’il y en aurait aujourd’hui plus de fer dans les infrastructures humaines que dans la croute terrestre. Le fer est donc aujourd’hui plus recyclé qu’il n’est extrait.

par l’EPFL, l’Ecole Polytechnique fédérale de Lausanne

Ce qui n’est cependant pas le cas des voitures à moteur thermique alimenté par du bioGNV, gaz méthane issu de la méthanisation. Ce procédé produit du biogaz par fermentation de matières organiques issues des déchets de l’agriculture et/ou de la collecte des ordures ménagères préalablement triées, et/ou de l’industrie agroalimentaire.

Sa combustion dégage principalement du gaz carbonique biogénique, c’est-à-dire un carbone déjà présent dans la biosphère ; il n’ajoute donc pas plus de CO2 dans l’atmosphère qu’il n’y en aurait eu par décomposition de la biomasse.

Il faut cependant se garder de ne considérer que le rendement du moteur, mais, au contraire, considérer toute la chaîne depuis la source de l’énergie qui alimente le véhicule. Une telle analyse systémique permet de relativiser les rendements en comparant moteurs électrique et thermique. Le bioGNV pourrait alors jouer un rôle très important dans la transformation vers un parc automobile plus sobre.

L’Allemagne, connue et décriée pour la prédominance historique du charbon, surtout le lignite, dans son mix électrique, connaît depuis quelques années une dynamique de remplacement de ce combustible fossile (le pire de tous) par une production à partir de sources renouvelables, surtout éolienne, mais également solaire et biomasse. A tel point qu’en cette année 2020 la part des renouvelables devrait largement dépasser le charbon, avec un taux de couverture de plus de 52 % sur les 11 mois écoulés. A titre de comparaison, les charbons (lignite plus houille) ont permis de livrer au réseau 105 TWh, alors que les EnR en ont fourni 229 TWh (129 pour le seul éolien) sur les 445 TWh produits au total.

Le graphique ci-dessous montre cette évolution depuis 2015 :

Injection électricité dans réseau public allemand 11 mois 2020 (pdf, 70.5 kB)

Source : https://energy-charts.info/downloads/electricity_production_germany_2020_half_year.pdf

Une vidéo du journal Le Monde énumère les métaux contenus dans la VE : cobalt, lithium, graphite, nickel, manganèse… ; et puis enchaîne en donnant la parole G. Pitron, lequel nous remet le couvert avec son néodyme.

Pour les enfants dans l’exploitation du cobalt, il y a, entre autres, un media suédois qui s’y colle.

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ActiVE remercie M. CLAUDIO RUMOLINO  et la la Source Médiapart 

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